La délégitimation d’Israël

« La délégitimation d'Israël » : Les usages politiques et rhétorique d'une formule

L'équipe travaille sur un nouveau projet subventionné par la Israel Foundation Science (ISF), numéro 186 /12, coordonné par Ruth Amossy (ADARR, UTA) et Denis Charbit (ADARR, l'Université Ouverte, Israël), pour les années 2012-2015.

Membres actifs : Ruth Amossy, Denis Charbit, Nadia Ellis, Roselyne Koren, Karina Masasa, Michelle Soffer, Siven Wiesenfeld-Cohen.


La « délégitimation d'Israel » est une formule selon les définitions d'Alice Krieg-Planque's (2003, 2009) et, en tant que telle, circule largement dans la sphère publique, donnant lieu à des controverses qui marquent le caractère problématique de la notion. Nous nous proposons d'entreprendre une analyse des usages politiques et rhétoriques de la formule, principalement dans les contextes français et israéliens. Cela nous permettra (1) the retracer la genèse de la formule dans les discours qui traitent du conflit israélo-palestinien (2) d'examiner, à travers ses usages en contexte, les significations construites dans les échanges verbaux (3) d'analyser la signification politique du concept qui se dégage de la formule en la replaçant dans la pensée politique contemporaine. Un deuxième aspect, essentiel pour la recherche, consiste en l'analyse des usages argumentatifs de la formule pour voir comment ils influent sur la dynamique de l'échange, et dans quelle mesure ils innovent dans un dialogue de sourds déjà ancien. On investiguera ainsi la « guerre des légitimités" à laquelle la formule donne lieu – la délégitimation étant dénoncée comme illégitime par la partie pro-israélienne, tandis que cette accusation est à son tour traitée d'illégitime par tous ceux qui disent exercer un droit de critique impératif.

Il s'agira de vérifier sur le terrain l'effet global qu'exerce la formule et d'évaluer son efficacité rhétorique dans le débat en termes de : remporter la victoire vs. promouvoir un dialogue fécond.
Bien que le sujet soit pertinent dans de nombreuses parties du globe, l'exploration privilégiera Israël, où la formule est née et circule le plus abondamment, et la France, où le sujet sera traité dans le cadre des traditions, normes et doxa d'une culture spécifique. En France, la communauté juive est la numériquement deuxième du monde et elle côtoie une population musulmane estimée à 10% de l'ensemble de la population française. Le débat se déroule sur le fond d'un traumatisme profond dû aussi bien au rôle du gouvernement de Vichy pendant la Shoah, que de la colonisation de l'Algérie suivie de la guerre d'Algérie. Il se développe par ailleurs sur le fond de la crise contemporaine de l'idéologie républicaine.

La recherche porte sur un large corpus de débats qui comprend les discours scientifiques et populaires : écris académiques (Michelle Soffer), discours politiques dans les deux pays (Nadia Ellis), dialogues entre intellectuels (Denis Charbit), médias français (Ruth Amossy, Roselyne Koren et Karina Masasa), sites juifs en français sur Internet (Sivan Wiesenfled-Cohen).
S'inscrivant dans le cadre de l'analyse du discours et des théories de l'argumentation rhétorique, l'analyse des débats centrés sur la « délégitimation d'Israël » se situe au carrefour des sciences du langage et de la science politique. A travers ce double prisme, elle se focalise sur un sujet sensible en s'efforçant de traiter sur un mode scientifique dépourvu de biais une question qui est au centre de l'attention publique.